Délimitée par une frontière terrestre de 1 100 km et un trait de côtes de près de 380 km, la Guyane est recouverte à plus de 95 % de forêt équatoriale. Elle possède une zone économique exclusive (ZEE) de 133 949 km², soit l’équivalent de 40 % de la ZEE métropolitaine. La Marine y joue un rôle déterminant. Outre les missions classiques de souveraineté, elle lutte contre toutes les activités illicites en mer et assure la protection du centre spatial guyanais.
Adjoint interarmées du commandant supérieur des forces armées en Guyane et commandant la zone maritime Guyane, le capitaine de vaisseau Stéphane Faury revient sur les missions de la Marine en Guyane et le caractère stratégique de sa présence sur ce territoire.
COLS BLEUS : Quelles sont les missions et le rôle de la Marine en Guyane ?
CAPITAINE DE VAISSEAU STÉPHANE FAURY : Les unités de la Marine au sein des Forces armées en Guyane (FAG) participent à deux missions essentielles : protection des pas de tirs de fusées à Kourou et police des pêches. La mission Titan de protection du centre spatial guyanais (CSG) revêt un caractère prioritaire. Son volet maritime s’inscrit dans un dispositif interarmées global, également en charge de la protection terrestre externe, sous réquisition préfectorale, et de la sûreté aérienne. L’autre mission, la plus importante par le nombre de jours de mer qui y sont consacrés, est la lutte contre la pêche illégale (LCPI). La Guyane, seul outremer continental, constate régulièrement des infractions commises dans ce domaine par des pêcheurs brésiliens, à l’est, et surinamais ou guyaniens, à l’ouest.
Au-delà, l’action de la Marine ne se restreint pas à ces deux missions. Les FAG restent le principal acteur en mer pour tout le spectre des missions de l’action de l’État en mer, en coordination avec les autres partenaires : vedette des douanes (DF 45), unité légère des affaires maritimes (ULAM 973), brigade nautique de la gendarmerie, hélicoptère Dragon de la sécurité civile et, à l’horizon fin 2019, moyen léger de la société nationale de sauvetage en mer (SNSM).
C. B. : Quelles relations entretenez-vous avec les marines des pays riverains, en particulier la Marine brésilienne ?
CV S. F. : Avec le Brésil, partenaire stratégique régional, les FAG entretiennent des relations militaires étroites, plus particulièrement dans le domaine de la lutte contre la pêche illégale. À l’ouest, la Marine entretient une coopération navale certes plus modeste, mais tout aussi essentielle, avec le Suriname et le Guyana. Au-delà des patrouilles conjointes réalisées avec ces partenaires, notre coopération s’exerce aussi dans le domaine de la formation et de l’échange de bonnes pratiques, que ce soit à l’occasion d’escales ou d’exercices. Signe de notre coopération étroite avec le Brésil, la Marine nationale a, depuis 2015, mis en place un officier de liaison du 4e district naval brésilien au sein de l’état-major interarmées (EMIA).
C. B. : De quels moyens disposez-vous pour mener à bien vos missions ?
CV S. F. : La Marine a notablement investi en Guyane avec l’arrivée en 2015 de l’embarcation relève-filets (ERF) Caouanne et le remplacement, en 2017, des deux P400 par les patrouilleurs Antilles-Guyane (PAG) La Confiance et La Résolue. Les deux vedettes de surveillance maritime (VCSM) de la gendarmerie maritime Mahury et Organabo, devraient être renouvelées dans les deux ans. Ce dispositif est complété une à deux fois par an par des renforts spécialisés de métropole. Fruit du caractère interarmées qui anime les FAG, les aéronefs de l’armée de l’air – Casa, Fennec ou Puma – contribuent hebdomadairement à la surveillance de l’activité en mer, au guidage des unités de surface et, sur demande du centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage (CROSS) Antilles-Guyane, aux opérations de sauvetage en complément de l’hélicoptère Dragon.
C. B. : Quels sont les enjeux à venir de la zone maritime Guyane ?
CV S. F. : Les FAG travaillent à l’adaptation du dispositif interarmées de sécurisation du nouveau lanceur Ariane 6 qui verra le jour à l’horizon 2020. La pêche illégale a sensiblement reculé, mais imposera toujours une présence marquée et des missions LCPI exigeantes. D’autres axes de développement sont en cours, au large, mais aussi au plus près de la mangrove, dans le cadre du contrôle des flux logistiques au profit de l’orpaillage illégal. La Guyane est et restera une affectation passionnante pour un marin désireux d’action.
À retenir
Les deux missions principales de la Marine en Guyane sont la protection du centre spatial guyanais et la lutte contre la pêche illégale.